On l’a un peu annoncé dans notre dernier article, en quittant Cochabamba on avait en tête un petit défi. Pour cela, nous nous sommes rendus dans le parc national de Sajama. Cela n’a déjà pas été chose facile : on a dû prendre deux bus, dormir dans un hôtel dégueu (un des pires du voyage !) puis prendre un minibus plein à craquer pour atteindre le minuscule village de Sajama.

Le parc national a été créé pour protéger la plus haute forêt du monde, perchée à plus de 5 000m sur les flancs de l’imposant volcan Sajama, le plus haut sommet du pays. Soyons honnêtes, ce ne sont pas ces arbres qui attirent les quelques courageux touristes qui viennent par là, mais plutôt les trois monstres qui se dressent fièrement à plus de 6 000 m, dans un périmètre assez restreint : Le fameux Sajama (6 548 m), le Pomerape (6 282 m) et la Parinacota (6 348 m). Et devinez quoi ? C’est sur ce dernier qu’on a jeté notre dévolu. Alors que les deux autres s’adressent plutôt à des alpinistes expérimentés, le Parinacota peut se gravir sans équipement particulier. Renseignements pris sur d’autres blogs, on contacte Mario Perez, un guide indépendant vivant dans le village (il y a aussi des agences à La Paz qui viennent à l’assaut du volcan), et on prévoit cette (folle) ascension pour le surlendemain.

Pour se mettre en jambe, on part donc pour une journée de marche tranquille (on est tout de même à 4 300 m d’altitude) jusqu’à des geysers, qu’on ne verra d’ailleurs jamais exploser. On ne va pas non plus se plaindre, le temps et les paysages sont magnifiques, on croise des centaines de lamas, d’alpagas, de vigognes, et aussi deux chiens complètement fous :P.

Le soir même, nous avons rendez-vous avec Mario pour mettre au point l’épreuve qu’on s’apprête à relever. On embarque avec nous Camille et Simon, un couple de français, les deux seuls autres touristes du village. On loue des chaussures d’alpinisme et des gros gants… On va quand même monter à plus de 6 000 m et ce en hiver, alors les tongs et le bikini sont bien loin ! Mario nous conseille de mettre trois pantalons, rien que ça, et pour le haut des habits chauds, plus une doudoune et un bon K-way. Il nous donne rendez-vous à 00h40 (oui oui, minuit 40) et nous souhaite une courte, mais bonne nuit.

Nous nous retrouvons donc quelques heures plus tard autour d’un café, un peu reposés, un peu stressés, et beaucoup impatients. On enfile nos chaussures, et on se met en route. Il y a 1h30 de 4×4 pour atteindre le camp de base, situé à 5 100 m d’altitude. Il est 2h45 quand nous entamons l’ascension, Mario en tête et Aurelio, l’autre guide, derrière. On marche très lentement, c’est le secret de la réussite. A 5100m, l’air est déjà rare, et notre but se situe plus de 1200 mètres plus haut, alors il faut gérer son rythme. D’ailleurs, on n’a pas vraiment le choix, c’est Mario qui l’impose et on le suit aveuglément. Il faut dire qu’il a déjà gravi un bon nombre de fois le Parinacota et ses copains, et qu’il connaît donc bien le comportement à adopter. Et éventuellement aussi, c’est son métier 🙂 .

On grimpe donc, petit à petit. Tellement lentement qu’on n’est même pas essoufflés, c’est bon signe ! Ce qui est moins bon signe par contre, ce sont ces petits flocons qui volent par-ci par-là. C’est la saison sèche, et ces petits machins blancs ne sont pas censés nous rendre visite… Lors d’une pause, nous demandons aux guides à quelle heure se lève le soleil. Leur réponse n’est pas vraiment celle qu’on aurait aimé entendre : « vers 7h, mais on ne le verra pas aujourd’hui ». Et effectivement, plus on avance, plus le vent est fort, plus la neige tombe, et moins on voit au loin. Mais bon, ce n’est pas ça qui nous arrête, on est des vrais oui ou non ??! Pas à pas, on avance en direction du sommet, jusqu’à atteindre la barre symbolique des 6 000 m. A ce moment là, on n’est plus aussi frais qu’à 3h du matin. D’ailleurs, Virgile et Camille commencent à peiner. Vu le temps pourri, on était surs à 120% de ne pas pouvoir profiter de la vue d’en haut, du coup ils décident de s’arrêter là et de redescendre avec Aurelio, la « mission 6000 » étant accomplie :).

Simon et moi sentons qu’on peut y arriver et on suit donc Mario pour les 350 mètres restants (de dénivelé). A notre rythme, il nous faudra environ une heure. Le terrain n’est plus le même, les flancs sont recouverts d’une couche de graviers sur lesquels on glisse beaucoup et où se relever est parfois un vrai challenge (la fatigue n’aide pas non plus). On marche aussi sur des petits monticules de glace irréguliers (des pénitents en langage savant), le tout avec un vent de dingue et un froid de canard qui nous gèle les sourcils, les cils et la barbe (enfin la barbe c’est plus pour Simon que pour moi, vous comprendrez bien pourquoi). Usée, au bout de je ne sais combien de temps, je fais signe à Mario que je vais m’arrêter, ce à quoi il répond « Allez Annabelle, le cratère est juste là, à 20 mètres ». Ah ! C’est qu’il faisait tellement beau qu’on ne le voyait pas l’idiot ! Ok, alors je continue, et quelques efforts plus tard, on le voit enfin. Mouais, on le voit, il faut le dire vite, jugez-en par vous même sur la photo. Bref, vous l’aurez compris, ce n’est pas la vue qui nous récompensera de notre effort. Par contre, la fierté d’y être arrivés, si ! On ne s’attardera pas, juste le temps de prendre quelques photos, tellement le vent nous glace.

Et maintenant, on attaque la descente. Alors que Virgile et Camille sont redescendus par là où on était monté (un chemin presque correct, même si parfois très instable), nous prenons une direction différente. Avant de partir, Mario nous encorde, et le moins qu’on puisse dire, c’est que c’était utile. Alors que nous avons mis six heures pour monter, la descente ne nous en a pris qu’une ! Honnêtement, je n’imaginais pas ça si physique. Nous sommes toujours dans cette épaisse couche de graviers et on se laisse glisser, généralement volontairement, parfois moins ! On chute à plusieurs reprises, et on apprécie la corde et Mario au bout qui nous stoppent parfois au milieu de notre toboggan improvisé. Le ciel est toujours ultra-couvert, le volcan est tout blanc, et on ne voit toujours absolument rien. On se demande d’ailleurs comment Mario arrive à se repérer pour nous faire rejoindre le bon endroit en bas, mais on fait confiance à son expérience et effectivement, on atteint le camp de base, exténués mais heureux d’avoir réussi ! Nos guides, eux, sont sereins, cette ascension est un peu une balade de santé pour eux faut dire :P. Et voilà, 1h30 de voiture plus tard, cette folle aventure touche à sa fin. ON L’A FAIT, grimper à plus de 6000 mètres !

Après cela, on a bien mérité notre après-midi de repos et de glandouille. On avoue qu’à ce moment là on aurait aimé retrouver une chambre bien chaude et même un bain si on craque vraiment, mais le petit village de Sajama n’offre pas franchement ce niveau de confort. Nous avions une douche chaude, c’était déjà très bien, pour le reste on avait des habits et des duvets… ! Ah si, il est vrai qu’il y a pas mal de sources chaudes autour du village, mais les quelques kilomètres à faire à pied sous la neige et dans le froid nous ont carrément découragés :).

Le lendemain, on se réveille et découvre la vallée entièrement blanche. On reprend le minibus pour aller jusqu’à la frontière avec le Chili qui est toute proche. Notre séjour Bolivien touche à sa fin, et on peut dire qu’on l’a terminé en grandes pompes ! Nous avons vraiment aimé ce pays qu’on a pu découvrir un peu différemment, en partie grâce à nos deux semaines à Cochabamba où nous avons vécu autrement que comme des touristes.

Notre prochain but : la ville d’Arica sur la côte chilienne. Il est normalement possible d’attraper au passage un bus venant de La Paz, mais vu l’état des routes on craint de devoir attendre longtemps dans ce froid de canard. Heureusement, le beau temps est revenu, et lorsque le soleil se montre, on dégèle un peu. Du coup, pour éviter une attente interminable, on tente notre chance auprès d’une camionnette immatriculée au Chili. Jackpot pour nous, ils sont d’Arica et acceptent de nous emmener jusqu’à là-bas. Ils nous facilitent la tâche pour le passage de la frontière, et re-jackpot ils sont en mode touristes : ils s’arrêtent prendre des photos des paysages magnifiques du parc de Lauca que nous traversons, embellis par la neige.

Nous avons passé une journée à Arica, qui ne fut pas la plus passionnante de ce voyage. Une petite balade sur la plage nous a suffi, et le soir nous mettons le cap sur San Pedro de Atacama !

Infos utiles

  • Trajet jusqu’à Sajama : il faut prendre un bus en direction de La Paz depuis Oruro ou Cachabamba, et s’arrêter à Patacamaya, environ 25 Bs/pers depuis Oruro. De là, prendre l’unique collectivo qui va à Sajama, qui part à environ 12-13h. On nous avait dit que de Oruro des bus allaient à Sajama mais il n’y en a pas. Il y a les bus internationaux pour le Chili qui passent pas très loin certes, mais il reste alors 10 km à faire à pied, et ces bus coûtent une fortune. Mieux vaut attraper le collectivo à Patacamaya qui coûte 30 Bs.
  • Parc National de Sajama : Cadeau surprise à l’entrée du parc, le prix est passé de 40 à 100 Bs/pers en octobre 2015… Merci !
  • Hôtel à Sajama : Hôtel Pachamama. 80 Bs/nuit pour une chambre double avec salle de bain et eau chaude. Propre mais rudimentaire quand même, comme à peu près partout dans le village si on ne veut pas dépenser 200$/nuit ! La mamita qui tient l’hôtel (la femme du chauffeur du collectivo) est très gentille. Elle propose aussi le petit-dej pour 10 Bs/pers et le dîner pour 18 Bs/pers. Impossible de se faire à manger seul dans ce village !
  • Ascension Parinacota : Excellent guide : Mario Perez. La mamita de l’hôtel l’a appelé pour qu’on le rencontre le premier soir et ensuite, nous sommes allés chez lui le lendemain pour avoir toutes les infos. On a payé 2000 Bs pour quatre personnes avec deux guides. Chaussures et gants loués en supplément à 25 Bs/élément. Possibilité de louer aussi des bâtons (on avait les notres). Mario est vraiment top et passer directement par lui est sûrement plus économique que par une agence de La Paz. De plus, cet argent lui revient directement à lui qui fait un excellent boulot plutôt qu’à l’agence en gardera une grande partie qui paiera une misère son guide…
  • Trajet Sajama – Arica: prendre le collectivo rouge (celui qui va à Patacamaya) qui part à 6h30 de la place principale du village. Il vous dépose au hameau Lagunas, où un autre collectivo vous amènera à la frontière pour 5 Bs. De la frontière, il y a normalement des bus vers 8h-8h30 (on croit) qui vont à Arica, on ne connaît pas le prix. Petit conseil : le stop marche très bien au Chili !